Les projets architecturaux et artistiques présentés au sein de l’exposition cherchent à donner un sens au pouvoir captivant du design qui a façonné une matérialité éloquente aux projections fictives du Congo, dans des contextes de marginalisation des perspectives subalternes. Le point d'ancrage historique de l'exposition est le courant belge de l’Art nouveau qui s'est développé à l'époque des incursions impériales du roi Léopold II au Congo. Avec sa taxonomie de lignes asymétriques ondulantes se métamorphosant en une flore exubérante, le mouvement - également connu sous le nom de Style Congo - soulignait la fascination du pays pour l'exotisme et le “primitif” des bois africains et des ivoires nacrés. Profondément lié à l'État indépendant du Congo, tant par les matériaux que l'inspiration, le mouvement d'avant-garde belge a également représenté la colonie africaine au sein de commandes coloniales et d’expositions internationales. En tant qu'œuvres d'art totales, ces expositions illustrent la synthèse des arts à laquelle aspirait le modernisme belge, non seulement dans l'architecture et les arts appliqués, mais aussi dans la fusion entre dispositifs de monstration et collections – donnant naissance au canon des présentations institutionnelles ultérieures des musées ethnographiques. Par leurs constructions captivantes et leurs vitrines séduisantes - toutes utopiques à leur manière - les expositions donnaient à voir le Congo en tant que colonie africaine lucrative et champ d'influence créatif pour les artistes et architectes belges. En présentant simultanément l'authenticité et le progrès, elles ont servi de plateforme à la propagande politique et aux échanges économiques de capitaux internationaux, à la construction d'infrastructures dans les colonies. Par le biais d'interventions artistiques et architecturales, d'archives et d'une large sélection de pièces issues des collections du CIVA, l'exposition propose de commenter les politiques de représentation et d'appropriation à l’oeuvre à l’occasion de ces événements considérés comme des "zones de contact" par Mary Louise Pratt ; des espaces où les cultures se rencontrent, s'affrontent et débattent, le plus souvent dans des contextes de relations de pouvoir hautement asymétriques. Une chronologie visuelle de la représentation du Congo au sein des expositions internationales entre 1885 et 1958 sert de fil narratif à l'exposition. Une série de projets se déploient à partir de celui-ci, qui visent à déstabiliser les visions normatives associées à cette histoire et à ce patrimoine. En examinant les traces de la colonialité dans le paysage urbain bruxellois et congolais, ils poussent au débat concernant une possible décolonisation des espaces privés et publics, et la possibilité d'ouvrir un espace pour ramener les marges au centre. L'exposition est accompagnée d'un programme public qui débute en mars 2023.
The Unmade Pavilion (working title)
Location: Rue de l'Ermitage, 1050 Ixelles